Cartel des camions : Hausfeld remporte une victoire décisive à Amsterdam

Le 12 mai 2021, Hausfeld a remporté pour ses clients une victoire déterminante devant le Tribunal de District d'Amsterdam (le Tribunal) face aux constructeurs de camions : la quasi-totalité des moyens des constructeurs ont été rejetés. En particulier, le Tribunal a rejeté leur prétention selon laquelle les demandeurs ne pouvaient théoriquement pas avoir subi de préjudice et que les demandes devaient être rejetées immédiatement.

Le 16 juillet 2016, la Commission européenne a sanctionné cinq constructeurs de camions - MAN, Volvo/Renault, Daimler, Iveco et DAF - (les Constructeurs) pour s’être entendus sur les barèmes de prix bruts et sur le calendrier d’introduction des nouvelles normes d’émission ainsi que la répercussion de leurs coûts sur leurs clients (la Décision de 2016).

Hausfeld a engagé aux Pays-Bas plusieurs actions en réparation contre les Constructeurs pour le compte de plus de ,000 clients ayant acquis plus de 250,000 camions durant la période du cartel.

Ce jugement fait suite à une audience s’étant déroulée les 24, 25 et 26 novembre 2020.

Les Constructeurs ne peuvent pas se dédire

Les plaidoiries des demandeurs se sont largement appuyées sur les précédents succès procéduraux obtenus par Hausfeld devant les tribunaux britanniques (en première instance et en appel). Les juges ont notamment souligné les points suivants :

  • Les Constructeurs sont liés par l'ensemble de la décision de la Commission européenne, dont ils ont pu négocier les termes pendant neuf mois ;
  • L'infraction ne relève pas d’un simple « échange d'informations », comme avancé par les Constructeurs, mais il s’agit bien d’une entente sur les prix ; et
  • La décision rendue en 2017 contre Scania peut être utilisée contre les Constructeurs. Cette seconde décision, bien qu’encore confidentielle en grande partie, est accablante pour les Constructeurs puisqu’elle détaille leurs réunions et échanges illicites.

Le Tribunal a jugé que la Décision de 2016 couvrait non seulement les ventes de véhicules neufs directement auprès du constructeur, mais également les ventes impliquant des concessionnaires intermédiaires.

Les demandeurs ont pu subir un préjudice du fait de l'entente

À ce stade de la procédure, il revenait aux demandeurs de démontrer qu’en théorie, ils ont pu (au moins plausiblement) subir un préjudice du fait de l'entente.

Les Constructeurs ont principalement plaidé que l’infraction n’entrainait aucun préjudice, et que les demandeurs n’avaient pas suffisamment étayé leur démonstration du contraire. Leurs expertises économiques tendaient à démontrer l'absence totale de préjudice, à défaut notamment de lien entre les barèmes de prix bruts (principal objet de la collusion) et les prix nets (sur lesquels ils se sont accordés plus ponctuellement).

Le Tribunal a cependant exprimé son total désaccord vis-à-vis de cette théorie :

  • Il importe peu qu'il ait pu encore y avoir une forme de concurrence durant la période du cartel. Étant donné que les réunions des Constructeurs avaient lieu à un niveau élevé au sein de leur hiérarchie et ne concernaient que les barèmes de prix bruts, l’illusion d'une concurrence parfaite pouvait être entretenue tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de leurs organisations.
  • L’une des expertises économiques déposées par les demandeurs a été jugée « concluante et convaincante » .

« Même lors de l'audience, les constructeurs de camions n'ont pas été en mesure de fournir une réponse convaincante à la question de savoir quel était le but de l'échange d'informations au sujet des listes de prix bruts » ,

ont ainsi écrit les juges dans leur jugement.

En conclusion, le Tribunal a estimé qu’il ne peut être exclu que l’infraction ait entraîné un préjudice pour les demandeurs.

Lors de la prochaine étape procédurale, les demandeurs devront démontrer que chaque transporteur a au moins vraisemblablement pu avoir subi un préjudice du fait de l'entente.

Laurent Geelhand, associé gérant des bureaux Hausfeld à Bruxelles et Paris, note que « ce jugement est un soulagement bienvenu pour nos clients, qui ont été affectés par le comportement illégal des Constructeurs. Cinq ans après la publication de la décision, nous nous attendons maintenant à ce que ce contentieux produise des résultats concrets - dans l'intérêt de nos clients ».